AUTOUR DE BACCUS – PATRICK LEBAX

Cela commence presque comme une épreuve de philo : « l’homme est-il une composante du terroir ? » S’en suit un long – et instructif – manifeste sur cette notion si française que bien des spécialistes ont tenté d’expliquer. Les plus curieux ont leur idée sur la question : ils définissent le terroir comme une trilogie : le sol, la climatologie et l’homme. Les autres s’en moquent, pourvu que le terroir soit bon, c’est tout ce qu’on lui demande le soir après une journée de dur labeur. Bref, qu’on y arrive ou qu’on n’y arrive pas, qu’importe. Le terroir c’est ce truc indéfinissable qui fait que le vin est bon. Bien à l’endroit où il prend vie, avec juste ce qu’il faut de soleil et de pluie, de taille et de soins, bien élevé, grâce à la main du vigneron… Ici, le vin répond à l’ensemble de ce petit cahier des charges. Le sol : le plateau caillouteux de la Crau, lieu-dit bien connu de l’appellation Châteauneuf du pape, laisse les vieilles vignes (60 ans en moyenne) s’épanouir dans un sol où les « molasses du Miocène » font de la place à l’argile. La météo ? Une pluviométrie hivernale moyenne (200 mm) suffit à recharger ce type de profil qui ne subit que peu de déperdition. Le soleil fait le reste. Quant à l’homme, les hommes, Daniel et Frédéric Brunier, ils mettent en musique, comme on dit, à l’aide de plusieurs cépages (grenache noir 65%, mourvèdre 15%, syrah 15%, cinsault, Clairette et autres 5%). Châteauneuf est en effet une appellation autorisée à utiliser 13 cépages, un record national. Bref, vous l’avez compris, ce vieux télégraphe est un vin de terroir. Puissant et aromatique, il peut patienter un quart de siècle au moins avant de laisser ses tanins s’arrondir. Certains l’aiment plus jeune… c’est toujours une question de goût.

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